Le témoignage de Florine
Découvrez l’histoire de Florine, une jeune femme forte et courageuse. À travers son récit, nous espérons pouvoir encourager d’autres femmes traversant aussi cette épreuve.
“Bonjour,
Je me présente, Florine, âgée de 28 ans, en pleine hormonothérapie. Voilà mon histoire.
En début d’année, je me suis aperçue d’une masse dans le sein lorsque je me mettais de la crème hydratante sur le corps. J’ai commencé par regarder l’anatomie du sein sur internet, peut-être que ce que j’avais était une chose normale, mais rien ne justifiait cette chose en forme de bâtonnet que j’avais ressenti. J’ai alors décidé de prendre un rdv chez ma généraliste pour qu’elle me rassure et trouve une raison.
Quelques jours après, elle me reçoit et me dit que c’est peut-être lié à l’arrêt de la pilule, il y a 2-3 mois. Je dois tout de même faire échographie et mamographie pour confirmer. Je ressors soulagée. Je fais les examens demandés, ainsi qu’une biopsie demandée par la suite, et puis, le 14 février, chamboulement dans ma vie. Ma belle mère est la secrétaire de ma généraliste, et je reçois un premier appel au travail. Je ne peux répondre sur le coup mais rien ne m’alerte. Puis deux appels, trois, quatre, cinq… Je ne m’affole pas, lorsqu’elle veut une réponse, elle ne lâche rien lol. Puis, quelques minutes après je vois neuf appels. Je commence à avoir peur, mais je pense plutôt à l’état de santé de sa propre mère. Un appel au travail, un client demande à me parler à moi, personnellement. Euh, ok, bizarre, mais pourquoi moi et pas une autre collègue ? En fait, il ne s’agit pas d’un client mais de mon mari. Je ne m’attendais pas à l’avoir, je ne l’ai pas reconnu !!
Mon mari m’explique que mon médecin a reçu mes résultats d’analyse et qu’ils ne sont pas bons du tout, que je dois partir du travail immédiatement parce qu’on m’a prévu un rdv chez la gynéco d’urgence. PANIQUE. C’est grave. D’accord, mais grave comment ? Une collègue passe par hasard, je commence à pleurer dans ses bras. Puis j’appelle un responsable, en pleurs, toujours, lui expliquant que je dois partir (une heure et quelque avant mon heure de fin habituellement prévue).
Ma belle mère a pu quitter son cabinet pour m’accompagner chez la gynéco. Elle m’occulte, me pose des questions sur mon état, sur mes antécédents. Elle me dit qu’il faut vite se débarrasser de cette merde. Mais je ne suis pas sûre de comprendre, et ne demande pas, n’ose pas demander de quoi il s’agit. La gynéco me demande où je veux me faire suivre, bah, je ne sais pas, c’est soudain, je ne connais pas les structures en plus ! Je choisis un hôpital près de chez moi, et je dois prendre rdv le plus rapidement possible. Ma belle-mère, toujours avec moi, me propose de directement aller sur place. Nous arrivons à l’hôpital, à 17h05 ou 10 alors que le secrétariat ferme à 17h… MAIS la secrétaire, toujours sur place, accepte de me recevoir, et demande au médecin s’il peut me prendre immédiatement, chose acceptée. (ouf)
Il parle également de « cette merde ». Mais lui, lance le mot fatidique un peu plus tard. À votre âge, ce n’est pas banal d’avoir un cancer qu’il dit. Alors est-ce que ça fait de moi… une cancéreuse ? J’ai le cancer ? Moi ? Mais pourquoi ? Pourquoi la vie me fait ce cadeau empoisonné ?! Il y a tellement de mauvaises personnes dans le monde, et c’est moi qui hérite de cette maladie ?! Je suis pourtant une assez bonne personne, ok j’ai fait des choses que je regrette, mais je me comporte bien ! J’ai subi des agressions, et maintenant on me donne cette étape à passer. Psychologiquement, je trouve que ça fait assez. Stop. Sentiment d’injustice.
Je rentre chez moi. Je préviens mes parents, frère et sœurs, puis mes amis les plus proches. Mon mari rentre du travail. Je pleure dans ses bras. Je lui raconte tout en détails. J’essaye cependant de positiver, tant que nous ne savons pas si la bête est dangereuse, étendue, on ne pense pas au pire. Les examens ont finalement montré que j’étais un stade 2, localisé uniquement dans le sein, grand mais peu dangereux.
La question de si on ne me retire que la tumeur ou le sein entier se pose. J’ai un petit sein, il y a une bonne quantité à retirer, ce qui fait que le médecin se pose la question, et m’envoie donc dans un autre hôpital pour un second avis. En attendant, je pleure en pensant à mon devenir, mon physique. 28 ans et un seul sein. J’aurai l’impression d’être incomplète. Et mon mari, comment va-t-il le vivre ? Direction l’institut Marie Curie. Face à trois médecins. On me dit que sans souci, on peut me faire une tumorectomie sans mastectomie. Soulagement. Puis on m’explique en détails pour la suite. Opération ok. Radiothérapie ok. Hormonothérapie pendant 5 ans.
Non, je veux bien encaisser le fait d’avoir un cancer maintenant, mais pas de bébé avant 5 ans alors qu’on envisageait de commencer les essais dans quelques mois ? Un projet qui me tenait tant à cœur. Non, ça, c’est trop pour moi, je me mets à pleurer devant eux. La femme médecin tente de me réconforter en me disant que je suis jeune, qu’elle, elle a eu son premier enfant à 40 ans et quelque. Ce qui a plus tendance à m’énerver, j’ai 28 ans, je n’ai pas 15 ans. C’est un âge normal pour commencer sa vie de maman, je connais même plusieurs femmes qui sont à leur deuxième enfant. J’ai envie de construire une vie de famille depuis longtemps, on avait enfin programmé le moment, et là, on me retire ce bonheur. Heureusement, on m’explique qu’on peut faire une coupure au traitement. Deux ans de médicaments, puis essai bébé, et reprise du traitement pour 3 ans. Bon, c’est mieux que rien on va dire. C’est moins long que prévu, et on m’assure qu’il n’y aura pas de souci pour tomber enceinte après. On reprend la positive attitude.
L’opération se fait. Mon beau père, ma mère, mon mari sont présents pour m’accompagner. L’infirmière m’appelle et me demande de la suivre, ce que je fais. Elle m’installe dans la chambre. Mais, euh, déjà ? Je pensais revenir dans la pièce. Je n’ai pas embrassé mon mari, ni dit au revoir à ma famille. J’ai envie de pleurer. J’avais besoin de ce dernier soutien avant la première grande étape du cancer. De mon clandestin, de ma bête, comme j’aime l’appeler.
L’opération se passe bien. Ma sœur a quitté le travail plus tôt pour me rejoindre à la sortie de l’hôpital, avec à nouveau ma mère, mon beau père, mon mari. Ca fait du bien d’être soutenue, aimée. Ils sont parfois plus apeurés que moi d’ailleurs. Je suis très optimiste sur les faits. Je me surprends. Depuis le début je me sens forte mais j’ai quand même pleuré, et je pense que c’est normal. Je me suis toujours rassuré en pensant à mon état peu avancé, peu dangereux.
Vient le moment de retirer les pansements, et là, je ne me sens pas bien, c’est moche, c’est douloureux, c’est presque écœurant. Je n’arrive même pas à me doucher sans toucher le sein, ça me fait mal, je ne peux pas me rhabiller seule, je ne peux pas lever le bras. Le temps passe, les choses s’améliorent.
C’est à ce moment là que survient la question de la chimiothérapie. Les médecins n’ont pas pu statuer sur mon cas. Nous avons des médecins qui affirmaient qu’il fallait absolument passer par là, d’autres qui étaient contre, et les médecins dans le doute. D’une part, la taille de la bête était grande, je suis jeune, avec des antécédents familiaux bien qu’éloignés, d’autre part, la chaine ganglionnaire n’est pas touchée, il n’y a pas de métastase, et la bête n’était pas féroce. La solution trouvée : le prélèvement va partir en laboratoire pour analyse de la prétendue récidive. Il faut donc encore attendre plusieurs jours, dans la crainte. Et la nouvelle arrive enfin. Taux de récidive estimé à un niveau très bas, 9%. Pas de chimiothérapie pour moi. C’est le grand festival dans ma tête, un soulagement immense, la fanfare joue, les danseurs bougent leur corps en rythme, mais il faut quand même se concentrer sur ce qu’on me dit. Mon oncologue m’explique qu’avec 10% je l’aurais eue. Le tout petit pourcentage qui change toute une vie. Un petit chiffre à si grandes conséquences physiques et psychologiques ! Voilà encore une raison de positiver sur mon état. J’ai gardé mon sein, et j’échappe à cette dure épreuve qu’est la chimiothérapie. Je me sens tellement chanceuse.
J’entame ma radiothérapie qui dure finalement plus de temps que prévu. Je devais en avoir pour cinq jours par semaine, j’en ai fait finalement sur quatre, sur un peu moins de trois mois, de mémoire. Ne pas s’épiler, ne pas mettre de déodorant, j’ai eu de la chance de ne pas la faire pendant les grosses chaleurs !
Prochain rdv d’hormonothérapie annulé par la secrétaire et déclalé un mois plus tard. Ca me fera un mois de repos, la maladie à l’écart de ma vie. Le premier comprimé a été compliqué, tant par l’effet psychologique du retour de la bête dans mon quotidien, le fait que le comprimé m’empêche d’avoir un enfant, et aussi parce que je suis quelqu’un qui a du mal à avaler les médicaments. Au bout de quelques semaines je m’y suis faite. Au début, j’ai eu crampes et fourmis, ça revient vraiment rarement, au quotidien par contre, les bouffées de chaleur, ça y est, je m’y suis familiarisée ! Depuis quelques jours, peut-être la prise de poids, je ne mange pas différemment, je fais encore plus de sport, j’ai du mal à fermer le pantalon, et le tour du soutien gorge. La fatigue arrive aussi. Mais pour ces deux là, je ne sais pas si c’est vraiment lié au traitement ou non.
Sur les réseaux sociaux, j’ai par hasard découvert une course particulière : la Muddy Angel Run. Je ne suis pas une athlète, je n’ai pas une grande endurance, mais j’ai été tout de même tentée. Pour moi. Pour me dire que j’arriverais à le combattre jusqu’au bout, qu’il n’a pas réussi à m’achever. Mais aussi pour toutes celles qui sont comme moi, et surtout celles qui sont à un stade plus avancé, qui n’ont pas mon moral. Je n’ai pas un entourage très sportif, je n’ai pas voulu proposer à mes gens de courir avec moi parce que j’avais l’impression de les forcer en tirant la carte c’est pour le cancer du sein, et je suis moi-même touchée, alors viens courir avec moi ! J’ai donc lancé plusieurs perches, mais dans le vide. Ou alors on a récupéré la perche, vu le prix, et on a relancé la perche plus loin. Tant pis, j’y suis allée seule. C’est beaucoup moins fun, mais c’est pour la bonne cause. Quand j’ai vu toutes les participantes, j’ai tenté tant bien que mal de ravaler mes larmes, c’était si émouvant de voir tout ce monde regroupé pour une seule et même cause, qui me touche personnellement. Et ce sentiment lorsqu’on franchit la ligne d’arrivée, c’est tellement bon !! Ca donne envie de recommencer !
Voilà pour mon histoire. Il me reste à ce jour 1 700 comprimés, et si on compte la coupure pour l’essai bébé, 605 ! Je me raccroche à ça pour tenir. Alors vivement les 2 ans de tamoxifène, le retour des règles et le bébé. Dans quelques années, je pourrais reprendre une vie comme les autres, avec les contrôles à faire quand même. Dans quelques mois, j’aurais la longueur nécessaire pour faire un don de cheveux pour la confection de perruques pour celles qui en ont besoin. L’association solid’hair est géniale, et mérite d’être connue ! J’ai hâte de pouvoir faire ce geste.
Tenez bon, on arrivera à combattre notre bête ! Positivez comme vous pouvez, il y a très souvent pire que nous, en parlant cancer ou toute autre étape de la vie. Soyez fortes. Si vous en ressentez le besoin, parlez sur les forums. Ne vous renfermez pas sur vous-même. Des bisous à toutes.“
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